Mémoire au sujet de la révision du PMGMR 2024-2031 ; Le compostage, plus important que jamais!

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Mémoire de Craque-Bitume au sujet de la révision du Plan Métropolitain de gestion des matières résiduelles (PMGMR) 2024-2031 pour la Rive-Nord de la Communauté métropolitaine de Québec

Description de Craque-Bitume
Craque-Bitume est un organisme actif en écologie urbaine dans la ville de Québec depuis maintenant plus de 11 ans. Né d’une initiative citoyenne, l’organisme porte une mission de développement et de promotion d’actions écoresponsables favorisant l’engagement citoyen et l’adoption d’un mode de vie durable. Ses principaux champs d’action sont le compostage urbain, l’agriculture urbaine et les formations écocitoyennes.

L’intérêt de Craque-Bitume à l’égard de la révision du PMGMR
Craque-Bitume est, depuis ses débuts, un acteur important au niveau du compostage dans la Ville de Québec en faisant la promotion de la pratique auprès des citoyen·ne·s de la ville et en étant porteur du projet de compostage communautaire en partenariat avec la Ville de Québec. Ces activités et cette expertise en lien avec la gestion des matières résiduelles ont mené à ce qu’une place de membre votant au comité de vigilance de la gestion des matières résiduelles (CVGMR) de la Ville de Québec soit réservée à un représentant de Craque-Bitume. L’organisme est soucieux d’agir concrètement à améliorer les pratiques citoyennes en matière de gestion des matières résiduelles, et particulièrement de valorisation de la matière organique.

Résumé du mémoire
Craque-Bitume souhaite que le PMGMR mette en valeur la complémentarité des différentes approches en gestion des matières résiduelles organiques. En plus de la méthode de valorisation à grande échelle qu’est la collecte des résidus alimentaires pour l'usine de biométhanisation de la Ville de Québec, d’autres méthodes complémentaires, à plus petite échelle, sont à soutenir et à encourager. Ces méthodes, comme le compostage domestique et communautaire, jouent un rôle clé et permettent d’assurer une offre de services complète aux citoyen·ne·s, en comblant les besoins de certain·ne·s qui ne sont pas adressés par la collecte et en permettant une forme de réduction à la source. Comme mesures concrètes, nous proposons la subvention d’équipement nécessaire à la pratique du compostage aux citoyen·ne·s, ainsi que l’investissement dans les initiatives d’information, de sensibilisation et d'éducation, incluant le compostage communautaire.
Dans les dernières années, nous pouvons généralement constater que notre société continue de générer une quantité de matières résiduelles constante, et même légèrement à la hausse. Bien que le taux de recyclage de la matière organique putrescible ait nettement augmenté depuis 2018 selon le récent bilan sur la gestion des matières résiduelles 2021 de Recyc-Québec (1), ce taux n’est tout de même qu’aux environs de la moitié (50%) et la gestion de ces matières demeure un défi important pour l’avenir.

L’implémentation d’une méthode de valorisation à grande échelle de la matière résiduelle organique comme l’usine de biométhanisation dans la Ville de Québec est de toute évidence une bonne chose et permet enfin d’effectuer la collecte auprès de la majorité des citoyen·ne·s qui veulent bien trier leurs matières. Ceci dit, les initiatives à petite échelle, plus locales ou in situ, sont toujours à favoriser. En effet, pour les personnes qui sont prêtes à le faire, composter soi-même est une méthode qui est à promouvoir en premier lieu dû aux multiples avantages qu’elle présente. Bien que cela date d’il y a quelques années, les raisons derrière la recommandation suivante de la Politique québécoise de gestion des matières résiduelles (plan d’action 2011-2015) sont toujours aussi d’actualité : « […] les compostages domestique ou communautaire, qui réduisent à la source la quantité de matière organique putrescible à gérer, doivent d’abord être encouragés (2)».

Le compostage domestique évite toute gestion par la municipalité, incluant le transport des matières, se produit naturellement sans nécessiter d’apport en énergie, et émet peu de gaz à effet de serre. Du point de vue de la municipalité, il s’agit en fait d’une réduction à la source; l’une des seules manières de réduire la quantité de matières résiduelles générées par personne autre que de simplement produire moins de déchets. Puisque de plus en plus de communautés ont comme objectif d’inverser la tendance et de réduire cette quantité par habitant·e, comme la communauté métropolitaine de Montréal (3), par exemple, le compostage a donc un rôle potentiellement très important à jouer. Cette méthode produit un amendement de qualité pour le sol, le compost, qui permet de retourner à la terre de la matière organique nécessaire à la saine croissance des plantes. Cela permet de créer et de maintenir des sols vivants et fertiles. Au Québec, une importante problématique d’épuisement et de perte de sols arables est de plus en plus rapportée (4). L’ajout de compost à ces sols à long terme peut représenter une solution à ce problème préoccupant. De plus, la présence de compost dans le sol favorise la rétention de l’eau dans celui-ci ainsi que de plusieurs nutriments essentiels à la croissance végétale, tels que le carbone, l’azote et plusieurs éléments minéraux. Il s’agit même d’une méthode de séquestration du carbone dans le sol (5).

Le succès d’une bonne gestion des matières résiduelles organiques repose sur le bon tri de la matière par les citoyen·ne·s, qui à son tour repose sur une éducation et une sensibilisation vis-à-vis cet important enjeu. En plus de jouer ce rôle auprès des personnes qui le pratiquent adéquatement, le compostage leur permet même de se rapprocher de la compréhension du cycle de la vie et de se responsabiliser face à celui-ci. Après avoir pris des éléments du sol via la croissance d’aliments pour se nourrir, il est alors possible de redonner au sol, ce qui peut contribuer au bien-être au niveau psychologique. De surcroît, le fait qu’une matière considérée comme un déchet soit utilisée en tant que ressource pour produire un résultat utile et possédant une valeur s’inscrit directement dans le concept d’économie circulaire. Le compost est utilisé pour faire pousser des aliments dont les rebuts pourront à leur tour être compostés, créant une boucle permettant de réduire sa consommation (par exemple, en produits fertilisants) et sa production de matière résiduelle.

Pour toutes les raisons énumérées ci-haut, Craque-Bitume croit que pour atteindre ses objectifs, le futur plan métropolitain de gestion des matières résiduelles (PMGMR) révisé de la Communauté métropolitaine de Québec devrait encourager, à travers ses différentes orientations, la pratique du compostage domestique. Comme mesure concrète, il serait très intéressant de considérer la possibilité d’offrir une subvention aux citoyen·ne·s pour acquérir l’équipement nécessaire à la pratique du compostage. Par exemple, à l’achat de composteurs individuels ou collectifs, il pourrait être possible de déposer une demande pour bénéficier de la subvention qui rembourserait une partie du coût de ceux-ci. Nous croyons que de 50% à 80% du coût serait une bonne fenêtre de remboursement pour réellement encourager la pratique.

Bien que le compostage soit facilement praticable personnellement, plusieurs raisons sont bonnes pour le pratiquer de manière collective, par l’implémentation de compostage communautaire. Malgré le plus grand nombre de personnes participantes, le compostage demeure à petite échelle, avec la plupart des avantages inhérents à cette qualité. Il permet aux ménages n’ayant pas d’espace pour l’installation de composteurs de s’adonner à la pratique, et a le potentiel d’effectuer un processus de compostage plus rapide dû à la plus grande quantité de matière, permettant l’atteinte d’une température plus élevée. De surcroît, vu le nombre de participant·e·s en mesure de mettre la main à la pâte, un suivi et un entretien plus réguliers peuvent être faits. C’est responsabilisant et éducatif, et permet d’accroître le sentiment de communauté et de partage.

Le compostage communautaire a par contre un inconvénient, et c’est le fait qu’il nécessite un plus grand niveau de gestion pour pouvoir fonctionner adéquatement avec autant de participant·e·s. Cet aspect fait en sorte que son fonctionnement est généralement plus coûteux que celui du compostage domestique. Ses points forts et la place que cette méthode comble dans l’offre de solutions aux citoyens en font néanmoins un élément essentiel, et nous croyons que cette pratique doit, elle aussi, être encouragée autant que possible, tant que l’intérêt et la participation sont au rendez-vous au sein de la population. Craque-Bitume souhaite donc vivement que le PMGMR 2024-2031 intègre cette vision à travers les mesures qu’il propose. Pour la Ville de Québec, il serait important que le réseau de compostage communautaire continue d’être mis de l’avant et financé pour répondre à la demande citoyenne, en tant que méthode complémentaire à la méthode à grande échelle qu’est la collecte pour l’usine de biométhanisation. En effet, avec l’ouverture de cette usine, nous sommes à un point tournant pour la Ville de Québec au niveau de la valorisation de la matière organique putrescible. Le taux de recyclage de ce type de matière augmentera certainement de manière très significative, et le taux en question atteint sera fonction de la volonté des citoyen·ne·s à trier adéquatement leurs matières résiduelles, et de la qualité de ce tri. De ce fait, l’information, la sensibilisation et l’éducation du public sont d’autant plus cruciales à ce moment charnière, et nous espérons un soutien et un financement soutenu et même accru des initiatives ayant cette visée. Un projet public, visible et bien établi comme le compostage communautaire contribue directement à donner une visibilité à la gestion des matières résiduelles organiques, de diminuer les préjugés et les réticences envers ce type de pratique, et incite finalement à modifier son comportement et à adhérer au tri de ces matières.

En conclusion, nous espérons vivement que la révision du PMGMR pour la Rive-Nord de la Communauté métropolitaine de Québec aura un fort impact, et permettra d’adopter des orientations et d’encourager des mesures concrètes permettant une meilleure gestion de nos matières résiduelles. Particulièrement, Craque-Bitume souhaite un meilleur taux de valorisation des matières organiques et un effort vers une diminution de la quantité globale de matières résiduelles générées. Nous recommandons pour ce faire une reconnaissance et un investissement envers les initiatives d’information, de sensibilisation et d’éducation des citoyen·ne·s, de même que celles concernant le compostage domestique et communautaire.


Bibliographie

(1)  Recyc-Québec, Les matières organiques, PDF faisant partie du Bilan 2021 de la gestion des matières résiduelles au Québec (Bilan GMR), 2023.

(2) LégisQuébec, Politique québécoise de gestion des matières résiduelles : Loi sur la qualité de l'environnement, 2011, chapitre Q-2, a. 53.4.

(3) Communauté métropolitaine de Montréal, Gestion des matières résiduelles : le PMGMR 2024-2031 soumis en consultation publique, 2022.

(4) L’union des producteurs agricoles, La protection de nos terres.

(5) Marine Foulon, Du compost pour améliorer la séquestration de carbone dans les sols non cultivés, 2014.

 

Communauté métropolitaine de Montréal (10 novembre 2022). Gestion des matières résiduelles : le PMGMR 2024-2031 soumis en consultation publique. Site de la Communauté métropolitaine de Montréal. Consulté le 7 février 2023. https://cmm.qc.ca/communiques/gestion-des-matieres-residuelles-le-pmgmr-2024-2031-soumis-en-consultation-publique/

LégisQuébec (mis à jour le 1er août 2022). Politique québécoise de gestion des matières résiduelles : Loi sur la qualité de l'environnement. Site de LégisQuébec. Consulté le 7 février 2023. https://www.legisquebec.gouv.qc.ca/fr/document/rc/Q-2,%20r.%2035.1

L’union des producteurs agricoles (date inconnue). La protection de nos terres. Site de l’union des producteurs agricoles. Consulté le 7 février 2023.

https://www.upa.qc.ca/producteur/centre-des-communications/dossiers-thematiques/lautonomie-alimentaire-ca-se-cultive-ensemble/la-protection-de-nos-terre

Marine Foulon (9 décembre 2014). Du compost pour améliorer la séquestration de carbone dans les sols non cultivés. Site de Zero Waste France. Consulté le 7 février 2023. https://www.zerowastefrance.org/compost-ameliorer-sequestration-carbone-sols-non-cultives/#:~:text=C'est%20d%C3%A9sormais%20un%20fait,durablement%20dans%20les%20sous%2Dsols.

Recyc-Québec (26 janvier 2023). Les matières organiques, document PDF faisant partie du Bilan 2021 de la gestion des matières résiduelles au Québec (Bilan GMR). Site de Recyc-Québec. Consulté le 7 février 2023. https://www.recyc-quebec.gouv.qc.ca/actualite/recyc-quebec-diffuse-les-resultats-du-bilan-2021-de-la-gestion-des-matieres-residuelles-au-quebec-bilan-gmr/